Bonjour à toi, Lecteur, je me nomme Christine Barsi, l’auteure du roman fantastique « Déviance II » publié par 5 Sens Éditions, en septembre 2019. Le connais-tu ? Je te propose l’extrait « Le château des Mackrey ».
Extrait de Déviance par Caitline Marinenh : « J’ai hâte que vienne le temps de ma maturité. ».
Caitline admirait une branche de houx au cœur d’un arbuste grimpant. Les petites baies fleuries jetaient des éclats rubis dans la nuit. La pâleur de l’astre lunaire contrastait avec le ciel indigo et les graines d’étoiles qui le parsemaient. C’était beau ! Majestueux. Beaucoup plus beau que dans son état précédent.
« Son état précédent », c’est ainsi qu’elle se voyait dans l’histoire d’avant. Une histoire qui n’avait plus lieu d’être, mais qui pourtant se poursuivait, sur une autre trame. Une trame qu’elle n’avait pas souhaitée, mais que dorénavant elle aurait revendiquée plus que tout au monde.
Ses perceptions s’étaient aiguisées en même temps que la confirmation de sa condition, en même temps que ses pensées se modifiaient pour emprunter un schéma plus percutant, que ses membres se renforçaient et que l’énergie en elle pulsait une vigueur maléfique, bien que jugulée.
Il ne s’était écoulé que quelques semaines depuis que Sean avait provoqué en elle la métamorphose, que les sens affolés du vampire avaient trahi l’homme en lui pour faire d’elle son égérie, un être plus tout à fait humain et en même temps tellement humain !
Roman Déviance (illustration Pixabay)
Récemment, Sean avait amorcé avec elle un entraînement régulier, bien qu’encore superficiel. Il refusait de dépasser le seuil de tolérance de l’organisme si fragile encore de sa femme. Comme il se refusait d’alimenter trop rapidement son esprit prompt à engranger des secrets qui pourraient la bouleverser.
L’imaginaire de Caitline s’était accru avec son statut. Ses dons d’écrivaine s’étaient développés au-delà de toute prévisibilité, au point qu’elle croyait vivre pleinement les scènes qu’elle couchait sur le papier ; des scènes bien plus tangibles que ce qu’elle expérimentait, encore, l’hiver dernier. Celles-ci s’inscrivaient dans sa réalité, dès que les mots affleuraient à son subconscient.
C’était perturbant, mais les sensations se révélaient fascinantes, presque magnétiques.
Cette lecture s’achève ici. J’espère que je t’aurais donné l’envie d’en lire davantage. N’hésite pas à te rendre sur mon site : christinebarsi.com.
Bonjour à toi, Lecteur, je me nomme Christine Barsi, l’auteure du roman de science-fiction « Thanäos, le tome 2 de La Passion de l’Arachnee » publié par 5 Sens Éditions, en septembre 2020. Je te propose la lecture du Prologue ».
Tout n’est qu’apparence, tandis que dans le cœur des hommes se terrent quelques-unes des roueries les plus maléfiques et les plus malsaines. Comment identifier l’ami qui ne vous trahira pas ni ne trahira tout ce en quoi vous croyez jusque-là ?
La jungle omniprésente et sa faune déviante, vibrante de cette énergie animale que ne maîtrisait aucun des grands décisionnaires de Terra et de ses succursales. C’est dans cet enfer qu’ils s’étaient embarqués en dépit des dangers, en dépit des avertissements multiples, poussés de l’avant par cette mission furtive autant que suicidaire dont ils ne comprenaient que ce que l’on avait bien voulu leur en révéler.
Camp de base dans Thanäos
Ils avaient enregistré des pertes dans leur équipe, récemment, et le camp qu’ils venaient d’investir, heureux d’avoir désormais un toit au-dessus de leurs têtes, n’était pas ce qu’il y avait de plus sécuritaire ni de plus rassurant ; mais c’était ce qu’ils avaient connu de mieux, depuis leur départ de Ranat la ville-garnison aux portes de Thanäos.
Camp de base dans Thanäos
Dorénavant, ils auraient à établir leur base d’opérations à partir de ce lieu, et à sillonner la jungle afin d’en débouter quelques Mutants à des fins d’observation. Isys rongeait son frein, s’interrogeant comme souvent sur les objectifs qu’on leur avait attribués. Elle se défiait des hauts pontes de Terra et de leurs sbires détachés sur la Colonie, et se doutait que certains d’entre eux cachaient un double jeu que le Gouvernement du Berceau encourageait. Seulement, se méfiait-elle assez ou bien ce qu’elle suspectait s’avérait-il bien en deçà de la réalité présente ? Isys ferait ce pour quoi elle était là : appréhender le monde mutant dans sa grandeur et sa déliquescence, et participer à la décision de l’ange qui l’incitait à croire et à espérer que ces fameux Mutants dont il était question possédaient suffisamment de cette humanité et de cette intelligence en eux. Le cas contraire, rien ne les préserverait des plans machiavéliques des grands manitous de Terra et de leurs alchimistes qui n’attendaient que la preuve formelle de leur monstruosité pour amorcer la première phase d’une dilapidation programmée.
Cette lecture s’achève ici. J’espère que je t’aurais donné l’envie d’en lire davantage. N’hésite pas à te rendre sur mon site : christinebarsi.com. À bientôt.
Je me propose de vous présenter le même extrait mais écrit, cette fois et non plus audio.
Chapitre : Prologue
Bonjour à toi, Lecteur, je me nomme Christine Barsi, l’auteure du roman fantastique « Déviance II » publié par 5 Sens Éditions, en septembre 2019. Le connais-tu ? Je te propose la lecture du prologue.
Extrait de Déviance par Caitline Marinenh : « Marinenh, mon pseudonyme, mon nom d’artiste, mon icône sacrée. Un nom qui coule ainsi qu’un torrent impétueux au plus profond de moi, mais ainsi qu’une rivière au cours tranquille tout en surface : une apparence ; une simple apparence. »
Publié quelques semaines auparavant, son manuscrit, Déviance, faisait la Une des journaux littéraires.
Heureuse qu’elle ait atteint le bout du chemin en ce qui le concernait, Caitline regrettait, cependant, que sa sortie ait réveillé l’intérêt des forces de police de York sur les derniers crimes commis dans le Yorkshire.
Stefan Henry, son éditeur, lui avait appris récemment avoir été contacté par l’un de ces messieurs de la Haute à ce sujet, l’interrogeant sur l’identité de l’écrivain derrière le pseudonyme. Caitline l’avait exhorté à ne pas la révéler. Plus tard, lorsqu’elle-même serait prête, et se serait assumée, elle s’amuserait à les approcher.
Mais pas maintenant.
Maintenant, elle avait de quoi s’occuper. Leur nouvelle demeure accaparait beaucoup de leur temps en réhabilitation, et elle devait organiser l’existence des enfants. Sa relation avec Sean se remodelait au jour le jour ; l’éducation qu’il lui donnait à elle et Peter, son premier né, afin qu’ils apprennent : pour elle à concevoir et surmonter le choc de la transmutation ainsi que la maîtrise appropriée de cette « renaissance », et pour Peter, plutôt pour le préparer aux années à venir alors qu’il appréhenderait à son rythme les conséquences de leur union, à Sean et elle.
Mais au-delà de ces conditions élémentaires, la jeune femme avait décidé de se remettre à l’écriture et d’amorcer le prologue d’un tome deux. Son côté macabre, en même temps qu’humoristique, probablement.
Caitline s’interrogeait déjà sur ce second « opus », à l’instar d’un musicien travaillant son œuvre et sa partition en vue d’une nième composition. Générerait-il, chez elle et son entourage proche, des répercussions significatives comme celles qu’avait provoquées le précédent tome de Déviance ? Les prémices d’une histoire personnelle inédite, un chamboulement d’une destinée qui se créerait continûment ?
Une gageure, peut-être.
Ou bien le signe que les êtres humains s’avéraient capables de bien d’autres exploits que de vivre le quotidien que l’on attendait d’eux, à l’instar de bons gros chiens fidèles ; le signe qu’ils étaient capables, au contraire, de se transcender pour atteindre le statut du dieu de leurs univers en propre.
Cette lecture s’achève ici. J’espère que je t’aurais donné l’envie d’en lire davantage. N’hésite pas à te rendre sur mon site : christinebarsi.com.
je me nomme Christine Barsi, l’auteure du roman de science-fiction « SolAs » publié par 5 Sens Éditions, en juin 2019. Le connais-tu ?
Je te propose la lecture et l’écoute du chapitre « Courants porteurs ».
Sciences et techniques des mondes connus : « Les courants porteurs sont un sport de haute voltige. Une erreur peut vous laisser indifférent, la seconde ne pardonne pas. »
Journal de l’Ère : « Le dernier grand évènement sportif de l’Onde porteuse a recensé trois accidents mortels et sept autres suffisamment sérieux pour nécessiter le concours des équipes de restructuration physiologique. La majeure partie des accidents survenus ont été causés par des erreurs de jugement et un manque flagrant d’anticipation. Seulement quatre d’entre eux ont été provoqués par une défaillance des systèmes porteurs. »
Revêtu d’une combinaison de vol appropriée, Niels dérivait sur le courant porteur dans lequel il venait de s’enferrer. Les membranes qui isolaient de l’extérieur hostile, l’enceinte dans laquelle il se trouvait, étaient conçues à partir d’un matériau dont il ne discernait qu’un schéma très partiel. Un matériau probablement similaire à celui qui constituait les parois diaphanes des couloirs de transport entre les Communs et ses sites annexes. Il avait l’impression de véritablement shunter le vide, et planer hors du complexe au-dessus des creux et des bosses martelant le sol torturé de l’astéroïde. Ses esquives pondérées anticipaient les courbes de la bande-champ avec une certaine dextérité, au contraire de certains voltigeurs aux gestes maladroits et brutaux ; des néophytes, à tous les coups.
Indifférent à la menace bien réelle d’une négligence, Niels s’égayait en ressentant dans ses tripes la peur sous-jacente, la bousculant par moments afin de se lâcher un peu et de tenter une figure plus audacieuse au risque d’être éjecté du ruban pulsé. Depuis les hauteurs aériennes, il pouvait admirer la terre noire et presque apercevoir les coulées de métal dont on disait qu’elles ruisselaient ainsi que des geysers à la surface même de ce morceau de roc stellaire. Les trous de vide et d’apesanteur témoignaient du dysfonctionnement aléatoire du générateur de pesanteur. Les instructeurs du Cercle auraient dû le prévenir. Des trois voies de courants porteurs, il avait dû se contenter de filer rapidement, avant de perdre le champ, vers la voie de garage unique qui le ramenait dorénavant à la base d’entraînement de ce genre d’activité.
Les options relatives à la pesanteur ou l’apesanteur étaient pléthore sur l’Aster, que ce soit le nombre de routes virtuelles théoriques ou le type de matériel utilisé, voile en solo, glisse au moyen de planches sur coussin d’air soutenu par des courants porteurs générés par des appareillages sophistiqués. Sa voile avait manqué se déchirer quand l’apesanteur l’avait soulevé, et sorti du courant neutralisé. Lui qui jonglait avec les emplis et les vides de l’air artificiel de l’engin de multipesanteur jouait aujourd’hui de malchance. Il s’était réglé sur des paramètres suffisamment larges pour être en mesure de naviguer à sa guise sur les portances de son choix. Hélas, il lui faudrait attendre la prochaine session de glisse apesantique pour se forger une expérience digne de ce nom. Les chutes de vol à voile et de glisse sur les courants étaient sa passion sportive. Peu d’astéroïdes encourageaient actuellement ce type de sport extrême. S’il s’était engagé sur ce caillou, c’était notamment pour cette palette d’opportunités.
Il avait croisé Maylis et Adheel, tout à l’heure, avant le décollage. Aucune de leurs options ne coïncidait, à l’exception de l’une de celles adoptées par Maylis : le raid. Ils s’étaient fixé rendez-vous pour la prochaine session. Niels avait hâte de voir ce que la technoS donnerait sur le terrain naturel de ce forban régurgité du cosmos ; lui, avait pratiqué la discipline récemment. C’était assez inattendu.
Au fur et à mesure de sa descente en semi-apesanteur, Niels commençait à mieux estimer les attributs de ce terrain qui leur était alloué pour ce sport un peu particulier. D’autres avaient déjà rejoint les parterres synthétiques et les générateurs reconnaissables à leurs sortes de becs qui bombardaient des champs distincts en direction d’espaces désignés. Une faille dans le champ le fit s’écarter du cadre fonctionnel, et sa voile et lui plongèrent d’une dizaine de mètres sans plus aucun contrôle. Familier du phénomène, il se laissa chahuter quelques secondes avant de reprendre la ligne de parcours, après quelques déhanchements disgracieux. Quand il finit par atterrir après avoir frôlé de près une chute spectaculaire, il souriait ; cette fois encore, il était passé près d’un chambardement de son existence.
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Je me propose de vous présenter le même extrait mais écrit, cette fois et non plus audio.
L’auditorium
Cahier d’Avril Scott : C’est en mille neuf cent quatre-vingt qu’est développé le premier animal transgénique. Pauvre petite souris aux hormones de croissance en surcharge ! C’est le tour d’une plante, un an plus tard. Chacun transformé en fabrique de produits thérapeutiques, ou encore de donneurs d’organes. Jusqu’où iront l’incohérence et la haine de l’homme ; jusqu’où ira son inconscience meurtrière ? Et ses prétentions démentielles sur les autres espèces. Seul, le sage peut endiguer cet holocauste.
Bactérie transgène
Au sein de l’auditorium de son unité de recherche, au cœur du centre d’affaires et de technologie d’Eveleigh, debout sur l’estrade surmontée d’un écran digital, Maur délivrait son discours bien huilé devant un cercle restreint de ses pairs, des patrons d’entreprises biotech pour la plupart, afin d’annoncer les futurs artefacts émergeant des lignes de production de son biocluster.
– Nos modélisations proviennent de notre matériel quantique relié à notre bonne vieille péninsule de San Francisco, ainsi qu’à un certain nombre d’autres technopoles, du côté d’Adélaïde ici même, dans ce pays, de Bangalore en Inde, du Singapour Science Park à Singapour, en Chine, au Japon, en Europe et notamment en France avec Antipolis ; tous les axes économiques d’importance, à l’échelle mondiale. Comme la plupart d’entre vous le savent déjà, BioJadh est membre de l’Association Internationale des Parcs Scientifiques. Cet immense réseau mondial des technopoles nous assure un terrain relationnel riche d’opportunités et un soutien infaillible. Ce choix du masque de personnalité n’est qu’un début, Messieurs ; il n’est que le précurseur d’une série qui ne va cesser de faire parler d’elle dans les mois et les années à venir. BioJadh, avec votre concours, compte aller bien plus loin dans ce secteur, en investissant notamment dans la communication neuronique.
ADN
La modélisation du fonctionnement des neurones et de leurs interconnexions s’avère déjà très avancée. Nous souhaitons nous appuyer sur la somme de connaissances d’ores et déjà emmagasinées sur le sujet, pour pénétrer ce domaine en y intégrant ce vaste champ d’applications que représente le génie biologique. Tout est permis désormais. Brisons le carcan des directives du Haut Conseil qui nous retiennent encore, et faisons fi des restrictions pour aller au-delà des limites et des interdits que nous imposent les normes mondiales. Il sera toujours temps d’intervenir et de mettre en place les mesures d’urgence adaptées, en cas de risque grave. Nous avons chacun dans nos escarcelles, la quincaillerie nécessaire pour enrayer n’importe quelle pandémie génique. Plus la dissémination d’organismes recombinés sera étendue, plus les autorités publiques auront de difficultés à les neutraliser et à entraver notre essor, et plus nos laboratoires auront de potentialités d’ouvertures pour agir. À nous tous, nous décapiterons le trop bien-pensant pour plonger dans un inconnu que nous seuls parviendrons à maîtriser.
Souris de laboratoire
Mais BioJadh ne s’arrêtera pas là, Messieurs.
Il y eut des applaudissements, puis la longue série de questionnements, de remarques et de suggestions inévitables avant que Maur puisse reprendre la parole, enrichir son exposé puis l’amener à la fin de la présentation, promettant qu’il profiterait du prochain congrès pour aller plus avant dans son sujet. Il savait tenir son public en haleine et jouait parfaitement de son charisme, comme il savait que cette seule conclusion entraînerait les récalcitrants à venir assister à l’évènement et à la remise des travaux les plus prometteurs de cette dernière année.
Cette lecture s’achève ici. J’espère que je vous aurais donné l’envie d’en lire davantage. N’hésitez pas à vous rendre sur mon site : christinebarsi.com. À bientôt.
Je me propose de vous présenter le même extrait mais écrit, cette fois et non plus audio.
Prologue
Cahier d’Avril Scott : Comment redéfinir un gène déviant ? Par le fait d’une manipulation extérieure ? Ou bien la réapparition d’une souche ancienne, au sein d’un nid d’organismes génétiquement modifiés ? La question paraît intéressante. Mais faudrait-il encore se la poser !
Une fin d’après-midi de ce printemps deux mille vingt-sept ; le soleil rouge embrasait les champs céréaliers à sa gauche et une prairie à sa droite, délimitée par une rangée de rondins mal écorcés qui s’alignaient le long d’un chemin de terre menant chez les agriculteurs du coin. Des trognes centenaires, dressées ainsi que des gardiens d’une autre époque, cernaient le cadre et l’horizon. Une pente herbeuse, inclinée, descendait dans leur direction vers une mare asséchée. Avril observa le vol d’un rapace qui allait et venait, de son nid tout en haut d’un tilleul, au poteau télégraphique en bordure du chemin. De ses ailes étroites, celui-là survolait les cultures les plus proches, en un gracieux glissé au-dessus des vastes étendues céréalières. De son point d’observation, Avril le suivit du regard un moment.
Faucon guettant sa proie
Quand il se mit en chasse, face au vent, la tête baissée, son vol devint stationnaire et ses battements d’ailes frénétiques, elle l’étudia plus attentivement. Il avait dû repérer sa proie, car très vite, il fondit vers le sol en piqué, à peu de distance. Elle put le distinguer plus franchement. Un Falco tinnunculus, le faucon crécerelle. Ses yeux noirs, sa tête et sa queue gris ardoise ainsi que sa poitrine mouchetée en témoignaient, comme tout à l’heure la succession de cris aigus : ki-ki-ki. C’était un mâle. Avril admira le contraste entre le jaune vif de ses pattes et de ses doigts, et le bleuté des épis dont la variante génétique pullulait dans la région. Le champ en était semé. Les hautes tiges transgéniques l’empêchèrent de distinguer les tentatives de l’oiseau pour saisir sa proie avec ses serres. Un rongeur, sans aucun doute.
La jeune femme imagina le bec crochu transpercer la peau du petit mammifère et se gorger de sa chair en un simultané stupéfiant. Une seconde, elle oublia ce qu’elle était pour se plonger pleinement dans la réalité présente du falconidé, empruntant son indifférence animale qui lardait de coups de bec la chair offerte, tout en goûtant l’ivresse sauvage de son espèce. Avril se révélait capable de faire cela au point d’en négliger sa propre personnalité et son appartenance à la race humaine. Elle ne savait pas d’où lui venait cette disposition singulière de son esprit à une telle malléabilité, mais celle-ci la fascinait ainsi qu’un maléfice dont on est l’objet, mais dont on ne souhaite pas malgré tout qu’il vous quitte. Elle n’en avait cure. Ce « don » ou cette « tare » lui permettait de parfaire sa connaissance des mœurs animales, aussi bien que des habitudes et des empreintes émotionnelles, imperceptibles, des plantes sous toutes leurs formes.
Pour l’éthologue qu’elle incarnait, cette manifestation de sa personnalité s’avérait un atout précieux qui faisait d’elle un être à part qu’elle ne galvaudait pas auprès de ses relations, détestant généralement parler d’elle-même et de ses particularités.
L’idée la fit rebondir sur une autre problématique actuelle. Ses associés rencontraient, ces derniers temps, des difficultés croissantes à dégotter des sponsors sensibles à leur anachronisme. Leur projet de parcs naturels, alternant les zones boisées et les prairies, intégrait une végétation de souche parmi les plus anciennes ; celle-ci ne comporterait aucune trace d’organismes génétiquement modifiés autre que les résistances acquises par l’incorporation aléatoire de transgènes et la sélection naturelle. Bien entendu, une faune qui ne subsisterait plus qu’en l’état de pré-extinction y aurait droit de cité.
Bientôt, plus personne ne s’intéresserait aux sciences qualifiées de « naturelles ». Plus de quatre-vingts pour cent des végétaux de ce monde étaient dorénavant assimilés d’une manière ou d’une autre à ces organismes dits « améliorés ». Et au sein même de cette proportion, plus de quarante pour cent n’avaient plus rien de « naturel » autre que leur nom d’origine que la junte industrielle, alliée à la mafia scientifique, ne s’était pas encore approprié au point de les renommer.
Champ de blé
Avril s’était rendu, aujourd’hui, sur ce site agricole pour appréhender par elle-même les conséquences de ces macros cultures déviantes, et comprendre mieux les impacts en série que ces dernières déclenchaient. Ici, en l’état, la flore sauvage n’existait plus. Elle étendit son regard sur toute la surface supérieure du champ, tentant de cerner ce qu’elle espérait y dénicher. Il n’y avait que ces milliers de plants bleutés dans lesquels étaient incorporés les enzymes et bactéries censés accroître les mécanismes d’autosuffisances et les rendements productifs. Aucun insecte vrai ne parcourait plus ces champs nécrosés. Seuls, des néo-insectes patrouillaient ces rangées mortuaires, leurs génomes artificiels leur permettant de butiner les artefacts de végétaux sans remettre en cause leur survie immédiate. Avril avait entendu parler, dans le secret de certaines alcôves laborantines, que même ces minuscules moissonneurs bioniques des champs déviants enregistraient leurs taux de déchets, mécaniques ou électroniques, après quelques centaines d’heures à peine de cette activité industrieuse.
Son regard plongeant dans les profondeurs végétales, dans l’espoir d’y découvrir ce qu’elle ne trouvait pas dans les hauteurs, elle repensa au petit rapace commun de ce secteur proche de la ville. Lui aussi subirait bientôt les effets de son passage entre les épis. Rares étaient ceux qui s’en sortaient, à long terme. Généralement, leur plumage se couvrait, au bout de plusieurs mois, de ce bleu foncé si reconnaissable pour l’œil averti de l’éthologue. S’ensuivraient les inéluctables conséquences pour les oiseaux.
Alors que la jeune femme fouillait le sol de sa vision précise, elle aperçut enfin ce qu’elle était venue chercher. Le plant fantôme existait bien, éloquent témoin dans un futur en marche. En plein milieu de ce champ morbide, l’émergence de quelques triples tiges identifiables d’une espèce mutante en un modeste îlot cerné de toute part, indemne, et se développant à l’insu des autres, l’un de ces parasites que les producteurs réussissaient à enrayer, la plupart du temps, mais dont la prolifération latente inquiétait énormément. En dépit de sa teinte, pas exactement conforme aux inventaires, le plant paraissait tout à fait normal. Des souches résistantes qui se multipliaient de manière erratique au départ, et qui, après un temps de dormance apparente, contre-attaquaient les nouvelles générations aux gènes incendiaires.
L’éthologue ne s’en étonnait pas.
Épis de blé
La capacité des organismes à se développer sur les terrains les plus incultes l’avait toujours impressionnée, et la rassurait tout à la fois. Quels que soient les impacts ultérieurs sur la biodiversité et sur les nappes phréatiques, pour ne nommer que ces deux domaines, il y aurait un retour de flux à la hauteur des transgressions réalisées contre la nature et ses bienfaits originels. Une modification de l’équilibre des écosystèmes amenait invariablement son lot de catastrophes que les hommes ne parvenaient pas à contenir. Dans ce combat pour la survie, les espèces sauvages, plus stables, se rebellaient chaque fois que l’occasion leur en était fournie, réapparaissant en force, un jour ou l’autre.
Du mouvement sur la terre meuble, là où le rapace s’était posé ; les tiges furent violemment écartées et le faucon s’envola avec sa proie inerte, suspendue entre ses serres. Il prit de la hauteur pour aller se percher sur le tronc d’un chêne pétrifié, à une centaine de mètres. Désorientée, avril émergea de ses réflexions intérieures et se focalisa sur la vieille souche, suffisamment élevée pour permettre un support sécurisé. Même les arbres moribonds contribuaient à la biodiversité en offrant un habitat à une faune disparate. Celui-ci avait-il été frappé par la foudre et fauché par un coup de vent particulièrement violent, ou bien la nocivité des céréales mortifères ne l’avait-elle pas épargné ? La jeune femme se pencha sur le sol et entreprit d’extraire, avec la plus extrême précaution, l’une des racines du plant invasif avant de le placer dans son récipient d’échantillons rangé dans son sac à dos. Elle l’examinerait plus tard, dès qu’un moment de répit s’offrirait à elle, et dans l’entre-temps, elle protégeait son existence. Par la suite, elle le réimplanterait, là où il aurait toutes ses chances.
Bientôt les agriculteurs du coin viendraient prendre leur tribut, et les quelques plantes non transgéniques seraient réduites en miettes, pulvérisées avec une acrimonie vindicative. Les preuves gênantes de la nature devaient être annihilées à tout prix par ces gens-là. L’éthologue rumina un instant ; leur informateur ne les avait pas trompés, ses associés et elle. Le champ et les suivants regorgeaient d’épis bleus déviants de seconde génération. Une déviance non reconnue par le Tiers Conseil américain. L’organe officiel était l’un de ceux créés, quelques années auparavant, pour pallier les dérives des sciences du génome. Rattaché au ministère de l’Environnement, sa fonction, bien que subsidiaire aux regards des experts, en imposait cependant, avec un certain impact, sur l’édiction des nouvelles lois dans le domaine.
Elle devait contacter leurs avocats. Un coup d’œil à l’horizon lui confirma qu’il était temps de repartir. Les ouvriers agricoles n’allaient pas tarder à revenir pour pulvériser d’autres variétés de leurs intrants destructeurs. Avril ne voulait pas risquer de se voir arrosée et découvrir par la suite que des excroissances lui poussaient à même les membres, ou que des nuances alarmantes entachaient son derme. C’était déjà arrivé à certaines de ses connaissances.
Cette lecture s’achève ici. J’espère que je vous aurais donné l’envie d’en lire davantage. N’hésitez pas à vous rendre sur mon site : christinebarsi.com. À bientôt.
Ce chapitre met en scène la confrontation d’une romancière avec son éditeur. Ses considérations concernent son art, ses périodes de désespérences relatives à ses personnages, et comment les aborder ; leur influence sur ses propres agissements. L’éditeur l’encourage à poursuivre et lui donne quelques conseils.
Le jeu de l’auteure, ici, est d’écrire l’histoire d’une auteure de romans fantastiques qui se heurte à son personnage principal, un vampire dont elle ne sait s’il n’existe qu’au travers des lignes de son manuscrit, ou s’il agit sur leur réalité et parvient à l’influencer insidieusement.
L’audio L’angle des points de vue correspond à l’un des chapitres du roman fantastique Déviance.
Bonne lecture !
L’extrait : L’angle des points de vue
Extrait : « Mes personnages et moi formons une communauté. Mais qui est aux commandes ? Eux ou moi ? Cela m’effraie parfois. »
Extrait : « Un artiste crée et modèle ses mondes à son image. Il est un Dieu qui ne se connaît pas, alors la question se pose de ses personnages. A-t-il le droit de les abandonner ? »
Caitline s’était rendu chez son éditeur avec les derniers chapitres réécrits. Il l’avait gentiment sermonnée sur sa venue tardive puis l’avait conduite dans son salon personnel qu’il possédait au rez-de-chaussée de la maison d’édition. Salon qui donnait sur une verrière lumineuse que la jeune femme appréciait chaque fois de redécouvrir. Il lui avait servi un thé accompagné de petits gâteaux au citron puis la discussion s’était engagée alors qu’il parcourait les feuillets dactylographiés en y griffonnant quelques annotations, de temps à autre. La jeune femme l’observait en silence ; son maintien décontracté et son profil au front large et serein respiraient la franchise et l’honnêteté. Cet homme avait le don d’apaiser chez elle les tensions que l’écriture amenait parfois.
— Puis-je vous soumettre une idée, Caitline ?
Il avait relevé la tête et l’étudiait à l’instar d’un maître prospectant chez son apprenti ou son égal, une trace de cet amour de l’art et de l’esthétisme qui l’habitait lui-même.
— Ai-je jamais réussi à vous l’interdire, Stefan ?
Ce dernier lui sourit et saisit sa tasse de thé avant d’en avaler une gorgée brûlante qui le fit grimacer.
— Je ne crois pas, non.
Il la scruta de manière plus appuyée et avança, certain de ce qu’il déchiffrait, en cet instant, chez elle :
— J’ai l’impression que vous ne prenez pas suffisamment de recul, ces derniers temps. Je me trompe ?
Ne se dérobant pas à son regard transparent, elle demanda, curieuse de découvrir la source de sa réflexion qui trouvait un écho en elle :
— Sur quel critère vous basez-vous, cette fois ?
Ca y était, leur petit jeu coutumier avait recommencé. La lueur amusée dans le regard de l’éditeur prévint Caitline qui s’en divertit à son tour.